Accueil >>
HOME
(Miniature) Héléna Cazaute : « On va garder la même philosophie »
Photo : Philippe Montigny
13/08/2023
Héléna Cazaute : « On va garder la même philosophie »
Après la très belle victoire le Challenger Cup, synonyme de qualification pour la prochaine VNL, l’équipe de France féminine est maintenant tournée vers le championnat d’Europe, qui débutera par un duel contre l’Estonie mercredi. Pour la capitaine Héléna Cazaute, l’important est de conserver la ligne de conduite qui a fait le succès des Bleues, en abordant chaque rencontre avec le même état d’esprit.
Dans quel état de forme êtes-vous, toi et l’équipe, à quelques jours du début de l’Euro ?
On a dû redescendre de notre nuage après la Challenger Cup. On a obtenu notre qualification pour la prochaine VNL, ce qui était l’objectif de l’été. J’avoue que cela a été un petit difficile, mentalement, de se remettre dans le bain pour le championnat d’Europe. Mais c’est le deuxième grand objectif de l’été. Ce qu’on a fait en Challenger Cup, c’est super, mais maintenant on veut faire quelque chose de bien au championnat d’Europe. On vient de faire une très bonne semaine d’entraînement. Les premiers jours à Montpellier avaient été un peu compliqués, mais arriver en Allemagne pour le stage nous a boostées, et on a  hâte de voir de ce que cela va donner contre une équipe que l’on retrouvera en VNL (entretien réalisé jeudi, avant les deux rencontres de préparation contre l’Allemagne vendredi et samedi, ndlr).

Personnellement, tu n’avais pas joué la Golden League au début de l’été. Comment cela avait-il été décidé ?
Ce n’était pas vraiment un choix. J’ai eu mal au genou pendant la saison, j’avais fait des examens qui n’avaient pas été concluants. On me disait que ça allait passer, que ce n’était qu’une petite inflammation. Mais au bout de deux entraînements, j’ai de nouveau senti cette douleur. On a rapidement fait un IRM, parce qu’on ne voulait pas pousser et découvrir quelque chose à la fin de l’été. On a découvert une petite fissure au niveau du ménisque. Heureusement, ce n’était pas chirurgical, j’ai fait une visco-thérapie, qui nécessitait ensuite un repos de trois semaines. Mais maintenant, je suis bien, j’ai repris, je n’ai plus de douleurs, je commence à me sentir beaucoup mieux physiquement. Je suis prête à attaquer ce championnat d’Europe.

Tu as retrouvé la compétition à Laval pour la Challenger Cup, mais avec ta performance on n’aurait pas dit que tu étais en phase de reprise...
C’est vrai que je ne m’attendais pas à revenir comme cela, je suis contente de ce que j’ai fait. Mais les filles m’ont aussi beaucoup aidée. Le fait que l’on soit vraiment un groupe, et qu’il y ait de bonnes attaquantes un peu partout fait que le ballon a été bien distribué, cela a été plus simple pour moi. Mais c’est vrai que je suis en forme, les trois semaines de repos ont fait du bien après une saison où physiquement cela avait été très difficile. Ces trois semaines ont été bénéfiques.

"La VNL ? Pour notre évolution, c’est super"

Pour revenir sur cette Challenger Cup, peux-tu nous rappeler à quel point cette compétition était importante ?
Avant les Jeux Olympiques, c’était un objectif pour nous de passer dans la catégorie supérieure. On veut se confronter à des équipes que l’on n’a pas l’habitude d’affronter, des équipes qui ont un jeu totalement différent. A Laval, on a joué le Viêt Nam, qui présente un style totalement différent du jeu européen, avec des combinaisons à n’en plus finir. On a dû s’adapter à ce jeu, on était un peu perdues pendant un set. Des équipes comme cela, on va encore en rencontrer, avec le Japon, la Chine ou encore la Corée du Sud. Il y a les Etats-Unis aussi, de grandes nations du volley, ce sont des équipes que l’on va rencontrer aux Jeux Olympiques. Pour notre évolution, c’est super, cela ne pourra nous faire que progresser. On pourra voir aussi où l'on en est, par rapport à ces équipes-là.

Gagner cette Challenger Cup était votre objectif, mais vous l’avez fait avec la manière. Est-ce que cela donne encore plus de confiance pour la suite ?
On a vraiment fait un super tournoi, on a été concentrées du début à la fin. On gagne le premier match 3-0 contre le Viêt Nam, on enchaîne encore par un 3-0 contre l’Ukraine, où l’on a fait honnêtement un match quasi-parfait, on les a vraiment étouffées du début à la fin. En finale contre la Suède, il y a un petit set où l’on perd un peu de lucidité, mais dans l’ensemble on fait quand même un très bon tournoi. Je ne dirais pas qu’on est confiantes avant l’Euro, parce que c’est une tout autre compétition, face à d’autres nations. On va garder la même philosophie, celle qu’on a toujours eue, c’est à dire de prendre match après match. On est vraiment concentrées sur le match contre l’Estonie, et on prendra ensuite les matchs les uns après les autres. On ne va pas se monter la tête à parler de médailles ou de choses comme cela, on est vraiment ‘focus’ sur l’Estonie.

Annoncer que vous voulez retourner en quarts de finale, pour faire au moins aussi bien qu’il y a deux ans, ce n’est donc pas votre état d’esprit ?
Non, non, non. Cela nous a porté préjudice par le passé, notamment au championnat d’Europe en Turquie en 2019. On affrontait la Finlande, et on se disait qu’on devait absolument battre cette équipe. Finalement, on perd 3-1, et on se retrouve avec le moral dans les chaussettes, cela nous avait vraiment tué la compétition. Avec le préparateur mental, on a travaillé sur cela. Il n’y a pas d’équipe à battre absolument, et pas non plus d’équipe face à qui on peut se permettre de perdre, pour une quelconque raison. On rentre sur le terrain avec la même mentalité : on veut gagner. Et on verra le résultat à la fin. Que ce soit contre la Serbie, l’Estonie ou l’Espagne, on garde le même état d’esprit, on ne laisse rien passer. C’est une mentalité qui fonctionne depuis quelques années, et on ne va pas changer parce qu’on a gagné la Challenger Cup.

Que peux-tu nous dire sur les adversaires du 1er tour (Estonie, Espagne, Finlande, Slovaquie, Pays-Bas) ?
Il y a une équipe qui sort du lot, les Pays-Bas. Mais ce ne sont que des équipes difficiles à jouer, qui ne lâchent rien, qui sont peut-être physiquement un peu moins grandes mais qui cherchent beaucoup les mains, qui font des feintes, etc. On l’a vu avec l’Estonie, elles manquent un peu de taille, mais elles font des feintes sur 40% des actions. C’est différent de certaines grosses nations, comme la Serbie par exemple, qui ont de grandes attaquantes, où c’est plus un défi physique. Là, il faudra être bien placées en défense, concentrées, se battre sur tous les ballons, parce qu’on sait qu’elles vont s’accrocher. Et ce sont des matchs tout aussi difficiles.

"C’est tout le collectif de l’équipe de France qui a progressé"

Emile Rousseaux parle souvent de votre travail et de vos progrès sur le plan mental, et tu as abordé le sujet tout à l’heure. Mais comment est-ce que cela se manifeste, et comment peut-on le travailler, ce mental ?
Christian Penigaud, notre préparateur mental, est arrivé dans le staff depuis quelques années. Il nous a énormément apporté à ce niveau-là. Il y a plusieurs moyens d’aborder la préparation mentale. J’ai beaucoup travaillé avec lui au niveau de mon service, et j’ai pu voir les bénéfices. Lucille (Gicquel) aussi a travaillé avec lui sur son service, chaque joueuse a des difficultés dans un certain domaine, et peut travailler sur des routines mentales, sur une intensité. Il y a différents aspects, c’est assez personnel. Mais sur la préparation mentale collective, ce qui est vraiment ressorti c’est bien de prendre match après match, d’être focalisé sur le présent, sur ce match-là, et de vouloir gagner peu importe l’adversaire, d’avoir une intensité à 100%, et pas à 80% parce que c’est une équipe qu’on doit battre. C’est ce “truc” qui a tout changé pour nous, dans nos têtes. Avant, on pouvait se dire: “C’est la Finlande, on doit les battre.” Et ce “doit”, le “devoir de”, il est terrible, parce qu’on se met une obligation de résultat. Et derrière, si le résultat n’est pas là, on se remet en cause : “Qu’est ce qu’on fait ? Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Pourquoi ?”. Et on se retrouve avec le moral dans les chaussettes.

Vos progrès ces dernières années sont collectifs, mais il y a aussi une évolution individuelle pour chacune des joueuses. Tu joues depuis deux ans en Italie, est-ce que cela t’a aidée à franchir un cap important ?
C’est sûr que le championnat italien est à mon sens le meilleur championnat au monde, avec la Turquie sans doute. Jouer dans un championnat pareil, avec des filles qui défendent tout, cela fait progresser. Même à l’entraînement, il faut toujours trouver des solutions pour attaquer, cela ne marche plus de faire toujours la même chose. Je pense avoir progressé, mais c’est tout le collectif de l’équipe de France qui a progressé. Il y a quelques années, certaines filles ne jouaient pas dans leur club. Maintenant, les filles commencent à être titulaires dans leur club, quitte parfois à descendre un peu de niveau, mais au moins elles ont du temps de jeu, elles progressent. Je trouve que cette année il y a énormément de jeunes qui ont progressé, qui peuvent amener beaucoup plus que les années précédentes dans notre jeu et dans le collectif. Je pense par exemple à Halimatou Bah, qui a joué toute la saison à Chamalières, et qui a fait des progrès remarquables. C’est dans ce sens-là que les filles doivent aller, c’est important qu’elles jouent toutes dans leur club. Quand on arrive en équipe de France, s’il y a 6 filles sur 12 qui jouent, le niveau ne sera pas forcément celui auquel on peut s’attendre. On voit aussi qu’il y a de plus en plus de filles qui jouent à l’étranger. Avant, il n’y avait que Christina (Bauer), maintenant on était trois en Italie (avec Amandha Sylves et Lucille Gicquel, ndlr), avec Lucille qui va partir en Turquie, et qui va acquérir une expérience en plus. C'est évident qu’elle va encore progresser.